ASSURANCE-CHôMAGE: LES (NOMBREUSES) PRéCéDENTES RéFORMES ONT-ELLES VRAIMENT FONCTIONNé?

Une énième réforme de l'assurance-chômage est en préparation, comme l'a confirmé Gabriel Attal ce mercredi. Elle pourrait être effective à l'automne prochain. L'objectif du gouvernement est de relancer un cycle de baisse du nombre de chômeurs en France pour atteindre le plein-emploi et améliorer les rentrées fiscales alors que les comptes publics ont sérieusement dérapé en 2023.

Depuis l'apparition du chômage de masse en France au début des années 1980, les réformes de l'assurance-chomage se sont succédé. Avec la même volonté de durcir les conditions (montant, durée d'indemnisation...).

Dans un premier temps il s'agissait principalement d'équilibrer les comptes de l'Unedic lourdement déficitaires avec l'explosion du nombre de bénéficiaires de l'allocation (de 400.000 en 1973 à 1,8 million en 1982). C'est l'objet des réformes de 1982, 1992 ou encore 1999. Ainsi entre 1979 et 2001, la durée maximale d'indemnisation d'un chômeur de moins de 50 ans est passée de 36 mois à 23 mois.

Mais alors que les comptes de l'Unedic sont dans le vert depuis 2022 et devraient le rester au moins jusqu'en 2025 selon l'organisme, les réformes de ces dernières années visent un tout autre objectif. Celui d'atteindre le plein emploi ou du moins d'améliorer très sensiblement le taux de personnes qui ont un travail (68% à date) et qui reste largement inférieur à la moyenne européenne. Un taux d'emploi plus élevé, c'est en effet plus de rentrées fiscales pour l'Etat mais aussi un meilleur pouvoir d'achat pour les salariés en positon de force pour négocier de meilleurs salaires.

Les salariés pas toujours au courant

Pour les "gouvernements Macron" successifs, le système d'indemnisation trop généreux en France n'inciterait pas à la reprise d'emploi. D'où la réforme de 2019 (entrée pleinement en application en 2021) qui a rendu moins aisé l'accès à l'allocation chômage. Pour avoir droit à l'indemnité, un bénéficiaire doit désormais justifier de 6 mois de travail au cours des 24 derniers mois alors qu'auparavant 4 mois sur 28 suffisaient à obtenir une indemnisation. Mais dans le même temps, la durée minimale d'indemnisation est passée de 4 à 6 mois pour respecter le principe établi en 2009 du "un jour cotisé, un jour indemnisé".

Cette réforme a-t-elle porté ses fruits ? Selon un rapport intermédiaire du comité d'évaluation de la Dares, le nombre d’ouvertures de droits a diminué de 14% entre 2019 et 2022 (passant en moyenne chaque mois de 204.000 à 175.000). Le taux de chômage est passé quant à lui de 8,1 à 7,2% de la population active selon l'Insee.

Pour autant, le rapport précise qu'il n'est pas capable de distinguer les effets de la réforme de ceux de l’amélioration de la conjoncture économique. Il ne ressort pas clairement, aux vues des études qualitatives menées par les auteurs, que les comportements aient changé suite à la réforme. De nombreux salariés "prennent ce que France Travail leur donne éventuellement, sans toujours en comprendre les caractéristiques", est-il indiqué.

Nouvelle réforme en 2023 avec la mise en place du système contracyclique à la canadienne qui distingue les périodes favorables (baisse des droits) et défavorables (hausse des droits). Elle a conduit à une baisse de la durée maximale d'indemnisation qui est passée l'année dernière de 24 à 18 mois pour les moins de 53 ans (de 30 à 22,5 mois pour les 53-54 ans et de 36 à 27 mois pour les plus de 55 ans). Une réforme passée dans un contexte où les pénuries de main d'oeuvre atteignaient des niveaux records en France.

Durée raccourcie de 100 jours

Quel bilan pour ce dernier tour de vis? A-t-il incité des personnes au chômage à reprendre un emploi? Il n'y a pas d'étude d'impact pour une période si courte mais ce que l'on peut constater déjà c'est que le chômage n'a pas baissé sur la période. Il a même augmenté de 0,4 point entre les premiers trimestres 2023 et 2024. Une hausse qui est certes imputable à la conjoncture mais que la réforme n'a pas enrayée. Alors que pour rappel, la conjoncture a tout autant été défavorable chez nos voisins mais sans hausse du chômage.

Un premier bilan dressé par l'Unedic un an après la réforme fait état quant à lui logiquement d'une réduction sensible des droits des nouveaux chômeurs.

"La durée moyenne de droit des entrants fin juin 2023 est inférieure de 100 jours par rapport aux entrées antérieures à février 2023, constatent les auteurs du rapport. Il est cependant encore trop tôt pour tirer des enseignements en termes de durée effectivement indemnisées, mi-2023 seuls 12% des allocataires étaient concernés par les règles issues de la réforme de 2023."

Autrement dit, est-ce que ce passage de 24 à 18 mois incite réellement les personnes sans emploi à en reprendre un plus rapidement? Le gouvernement qui souhaite à nouveau raccourcir les délais d'indemnisation semble le penser. En tout cas, la France a un des systèmes d'assurance-chômage les plus protecteurs d'Europe et fait partie des moins bons élèves en ce qui concerne l'emploi.

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