SALAIRE : POURQUOI LES EMPLOYEURS N’ONT AUCUN INTéRêT à AUGMENTER LES SALARIéS PAYéS AU SMIC

Notre système actuel d’allègements de cotisations patronales «fait qu’il n’y a plus beaucoup d’intérêt pour quiconque à augmenter les salariés au Smic», a souligné Gabriel Attal lors de son interview sur TF1. Voici pourquoi.

«Désmicardiser» la France. C’est l’un des grands thèmes abordés lors du séminaire gouvernemental sur le travail organisé par Gabriel Attal, mercredi 27 mars dans la matinée. Un sujet sur lequel le Premier ministre a pu revenir lors du JT de 20 heures de TF1, le même jour. «Entre la prime d’activité et les allègements de cotisations (patronales, NDLR) qui ont été mis en place, on a un système qui fait qu’il n’y a plus beaucoup d’intérêt pour quiconque à augmenter les salariés au Smic, a-t-il déploré. L’employeur, ça lui coûte très cher, et le salarié va gagner moins.» Le chef du gouvernement appelle donc à «revoir» le système actuel pour que les allègements de cotisations «incitent davantage à augmenter les salariés».

Le locataire de Matignon a déjà eu l’occasion de présenter ce projet, notamment lors de son discours de politique générale, prononcé devant les députés et ses ministres, le 30 janvier dernier. Gabriel Attal avait alors déclaré vouloir «faire évoluer un système qui nous a conduits depuis des décennies à concentrer nos exonérations au niveau du Smic». Car aujourd’hui, pour rappel, les employeurs bénéficient d’une réduction générale de leurs cotisations et contributions sociales (maladie, maternité, invalidité, décès, vieillesse, allocations familiales, accidents du travail et maladies professionnelles, contributions au fonds national d’aide au logement et de solidarité pour l’autonomie, retraite complémentaire, assurance chômage) sur les salaires inférieurs à 1,6 Smic (33 924,80 euros brut par an).

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Un coût réel de 238 euros pour augmenter de 100 euros un salarié au Smic

Mais le niveau de cette réduction est dégressif : plus on se rapproche du Smic, plus les exonérations de cotisations patronales sont élevées et, à l’inverse, plus on s’éloigne du salaire minimum légal - et donc plus on se rapproche du seuil de 1,6 Smic -, moins les employeurs bénéficient d’exonérations. Autrement dit, au-delà de verser un salaire moins élevé, maintenir un travailleur au Smic permet à un employeur de réaliser des économies en matière de cotisations et contributions sociales. Résultat : augmenter les salariés payés au Smic coûte cher aux employeurs puisqu’ils doivent payer davantage de charges. «Aujourd’hui, pour augmenter de 100 euros le revenu d’un employé au Smic, l’employeur doit débourser 238 euros de plus. Quant au salarié, il perd 39 euros de prime d’activité, il voit sa CSG et ses cotisations augmenter de 26% et il rentre dans l’impôt sur le revenu», a illustré Gabriel Attal, lors de sa déclaration de politique générale, fin janvier.

Le Premier ministre s’appuie sur différents outils pour faire une telle démonstration. D’après un simulateur de l’Urssaf, pour rémunérer un salarié au niveau du Smic (1 399 euros net par mois environ), l’employeur supporte un coût mensuel total de 1 897 euros. Ce dernier passe à 2 135 euros par mois, soit 238 euros de plus qu’auparavant, en cas d’augmentation de 100 euros de la rémunération nette du même salarié. Un autre simulateur mis à disposition par la Caf permet, quant à lui, d’estimer le montant de sa prime d’activité en fonction de son niveau de ressources perçues en 2023. Ainsi, un salarié payé au Smic fin 2023* (1 383 euros net mensuels) avait droit à 156 euros de prime d’activité par mois. En cas d’augmentation de 100 euros de sa rémunération mensuelle nette, le montant de la prime d’activité tombe à 117 euros par mois. Soit un écart de 39 euros, comme l’a souligné le locataire de Matignon dans son discours de politique générale.

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Pour réformer le système actuel d’exonérations de cotisations patronales et donc inciter les employeurs à revaloriser les plus bas salaires, le chef du gouvernement compte notamment s’appuyer sur les travaux en cours de deux économistes, Antoine Bozio et Etienne Wasmer. Ces derniers planchant sur l’articulation entre les salaires, le coût du travail et la prime d’activité et devant finaliser leurs travaux au mois de juin. «Je souhaite que dans le prochain budget, en 2025, il puisse y avoir des mesures pour garantir» une plus forte incitation à augmenter les bas salaires, a signalé Gabriel Attal, ce mercredi sur TF1.

* La simulation a été réalisée pour un salarié rémunéré au Smic fin 2023, célibataire, sans enfant, et dont le montant des aides personnalisées au logement (APL), également versée par la Caf, est pris en compte dans le calcul de la prime d’activité.

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